La reprise sera progressive
Après deux années de récession déclenchée par l’invasion de l’Ukraine par la Russie, qui a pénalisé l’activité européenne et le commerce extérieur, l’Estonie renouera avec la croissance en 2024. La reprise sera graduelle et n’atteindra pas l’ampleur de celle de 2021. Elle sera tirée par les hausses progressives de la consommation privée et des exportations de services, aidées, respectivement, par une croissance des salaires réels et un timide regain de la demande extérieure. Malgré un pic d’inflation attendu en début d’année, en raison de l’augmentation du taux de la TVA, la désinflation s’enclenchera à la suite du fort resserrement monétaire en zone euro. Néanmoins, la politique de la BCE a entrainé le renchérissement des coûts de financement, qui continuera d’affecter l’investissement des entreprises et des ménages. Les taux hypothécaires accrus ont affaibli le marché du logement, pénalisant la construction, alors que le coût élevé de l’énergie affectant les entreprises du secteur ne devrait pas baisser au cours des prochains mois. De plus, le chômage, qui a augmenté en 2023, devrait se stabiliser à un niveau élevé en 2024 (7%). La performance de l’industrie manufacturière restera fragile, avec des commandes de meubles encore peu vaillantes, puisqu’étroitement liées à la construction de logements en Finlande et Suède, dans lesquelles l’activité sera terne. Le pays misera donc plutôt sur l’exportation de services aux entreprises et des technologies de l’information et des communications (TIC) pour soutenir l’activité. Les fonds européens soutiendront l’investissement public, notamment via la Facilité pour la reprise et la résilience (FRR). Celle-ci a été étendue en 2023, afin d’inclure des nouvelles subventions s’élevant à 83,4 millions d’euros jusqu’à 2026 pour l’Estonie, au titre de REPowerEU, pour l’accélération de la transition énergétique.
Mise en place du programme d’assainissement budgétaire
En 2023, le déficit public s’est creusé avec la récession de l’activité économique et l’augmentation contracyclique des dépenses sociales et sécuritaires, qui continueront de pressurer le budget en 2024. En effet, le budget de 2023 a entériné la hausse permanente des dépenses militaires et de retraites, indexées sur la croissance des salaires et l’inflation de l’année précédente, ce qui empêchera une baisse substantielle du déficit, malgré les prochaines réformes d’imposition. A compté du 1er janvier 2024, le taux de TVA augmentera de deux points de pourcentage pour atteindre 22%. Le gouvernement prévoit également la hausse des taux d’accise pour l’alcool et le tabac et de la taxe sur les jeux d’argent, permettant de dégager des recettes additionnelles. L’Estonie ne rencontrera pas de difficulté dans le financement de son déficit, puisqu’elle présente le plus faible ratio d’endettement de l’UE. Elle dispose d’accès à des fonds supranationaux, comme la FRR accordée en 2021, dont le montant total s’élève désormais à 953 millions d’euros pour la seule Estonie, qui, en échange, devra atteindre ses objectifs d’ici août 2026.
En 2024, le compte courant continuera de s’améliorer jusqu’à afficher un excédent. La dynamique baissière des échanges commerciaux advenue en 2023 s’inversera progressivement. La reprise graduelle de la demande intérieure soutiendra les importations, alors que les prix de l’énergie resteront élevés. Les exportations de biens, notamment des appareils électroniques, du bois et des meubles, resteront moroses en raison de l’atonie nordique. Le surplus courant demeurera essentiellement généré par les exportations de services aux entreprises, le transport et les TIC. Les envois de fonds de l’étranger et les transferts en provenance de l’UE contribuent dans une moindre mesure.
Stabilité politique malgré un contexte économique et géopolitique difficile
La coalition, formée à la suite des législatives de mars 2023, comprend trois partis : le Parti de la réforme (libéral de centre droit), le Parti social-démocrate (SDE) et le parti libéral Eesti 200. Elle dispose de la majorité absolue, mais a été fragilisée en août 2023, lorsque les liens avec la Russie du mari de la Première ministre, Kaja Kallas, ont été révélés. Le mécontentement à l’encontre du gouvernement est grandissant, mais pas menaçant, alors que la coalition mène, depuis son accession au pouvoir, une politique d’assainissement budgétaire dans un contexte économique difficile. Le pays est particulièrement touché par la guerre en Ukraine et les sanctions contre la Russie. Depuis mars 2022, les importations de gaz russe ont cessé, le pays s’approvisionnant désormais par du GNL, issu essentiellement des pays baltes ou nordiques, avec lesquels il continuera d’entretenir d’étroites relations.
Le paysage politique danois reste relativement stable sous le gouvernement centriste, composé des sociaux-démocrates de centre-gauche, du parti libéral de centre-droit et des modérés centristes. Compte tenu de l'impopularité actuelle du gouvernement, dont les sondages avoisinent les 33 %, la probabilité d'une élection anticipée en 2024 semble minime (la prochaine élection doit avoir lieu avant octobre 2026). La prochaine élection du Parlement européen, prévue pour juin 2024, revêt une importance particulière.