Malawi

Une croissance soumise à la reprise du secteur agricole

Après une année 2022 marquée par les dommages humains et matériels liés à la tempête tropicale Ana, ainsi que par les conséquences inflationnistes du conflit russo-ukrainien, la croissance du Malawi connaîtra un léger rebond en 2023, qui s’accentuera en 2024. La reprise du secteur agricole (22% du PIB), après le double passage du cyclone Freddy début 2023, participera à ce regain, avec notamment une augmentation de la production de tabac qui tirera les exportations à la hausse (45% du total des exportations). Néanmoins, le prix encore élevé des engrais et les désordres climatiques attendus, liés au phénomène El Niño, risquent de peser sur les rendements des principales cultures du pays. De plus, si la reprise du secteur agricole (62% des emplois) favorisera la consommation des ménages, celle-ci continuera à être freinée par l’inflation élevée. La dépréciation du kwacha malawien, ainsi que la pénurie de certains biens importés du fait du manque de devises, continueront de renchérir les prix déjà élevés de l’énergie et de l’alimentation sur le marché domestique. Par ailleurs, l’approvisionnement erratique en électricité, 70 % de l'électricité du pays étant générée par des centrales hydroélectriques, continuera de freiner la croissance en 2023 et 2024. Un projet de ligne haute tension entre le Mozambique et le Malawi, dont la mise en service est prévue pour fin 2023, ajoutera 50 MV de capacité au réseau national, ce qui restera insuffisant pour dynamiser les investissements privés dans certains secteurs à l’instar du secteur minier. Néanmoins, un accord a été signé en mars 2023 entre le gouvernement et la société Globe Metals and Mining sur l’exploitation de la mine de niobium de Kaniyka, le premier projet d’exploitation de ce minerai en Afrique. En outre, des projets de centrales solaires, hydroélectriques et thermiques pourraient voir leur construction débuter en 2024, sous réserve que gouvernement et FMI s’accordent sur un programme assorti d’un financement, ce qui faciliterait l’approvisionnement en électricité.

Un risque de surendettement prégnant

En 22/23, le déficit public s’est davantage creusé sous l’effet d’une hausse des dépenses du gouvernement pour faire face aux conséquences du passage du cyclone Freddy et à l’épidémie de choléra qui s’en est suivie. La situation budgétaire s’améliorera légèrement en 23/24 grâce à une augmentation des recettes liée à la reprise attendue de l’activité. En parallèle, les dons des organisations internationales, estimés à 2% du PIB pour 23/24, continueront de compléter les revenus du gouvernement. Par ailleurs, le déficit courant s’est fortement réduit en 2022 sous l’effet de la baisse des importations en lien avec la faiblesse de la demande intérieure. Néanmoins, il se détériorera en 2023 et 2024, avec la reprise de ces dernières. De plus, le déficit du compte des revenus primaires, lié aux rapatriements des bénéfices des entreprises étrangères, continuera de peser sur la balance courante, alors que l’excédent du solde des transferts courants sera entretenu par les remises des expatriés (environ 8 % du PIB). La position extérieure du Malawi restera fragile en raison des importations clandestines de marchandises et des faibles entrées de capitaux, couplées au bas niveau des réserves de change (0,9 mois d’importations en juin 2023), drainées par les interventions de la Banque Centrale du Malawi sur le marché des changes pour maintenir un certain niveau de parité. Néanmoins, les réserves devraient augmenter grâce à la signature d’un accord avec le FMI sur une Facilité élargie de crédit (FEC) de 174 millions de dollars sur 48 mois, ainsi qu’à la conclusion d’accords de restructuration de dette, dont le service, estimé à 24% du budget de l’Etat pour 2023/24, pèse. Si le Malawi vient d’obtenir la restructuration de sa dette commerciale auprès de deux banques africaines (l’Afreximbank et la Trade and Development Bank), il reste exposé à un risque très élevé de surendettement. De plus, le gouvernement souhaite obtenir une restructuration de la part externe (46% du total) de sa dette détenue par les créanciers multilatéraux (30%) et bilatéraux (5%).

Une coalition fragilisée dans un contexte social tendu

Après l’annulation par la Cour constitutionnelle de l’élection présidentielle de 2019, pour motif de falsification des résultats, Lazarus Chakwera, leader du Malawi Congress Party (MCP), a remporté la nouvelle élection présidentielle de juin 2020, obtenant 59 % des voix, devant le président sortant Peter Mutharika, en poste depuis 2014. A la suite de ces élections, le MCP a remporté 54 des 191 sièges de l’Assemblée nationale, qu’il dirige à l’aide de l’Alliance Tonse, une coalition qui regroupe 8 autres partis pour un total de 75 sièges (candidats indépendants inclus). Cependant, l’alliance est paralysée par des luttes intestines qui ont amené Chakwera, en juin 2022, à retirer ses pouvoirs à son vice-président, éclaboussé par un scandale de corruption. En parallèle, les niveaux élevés de pauvreté et de chômage continueront de renforcer la frustration sociale dans un contexte d’inflation élevée. Par ailleurs, le Malawi poursuivra le renforcement de ses liens avec la Chine, principale détentrice de sa dette extérieure bilatérale et principale partenaire commerciale. De plus, en octobre 2023, le président du Malawi a signé un accord de coopération avec ses homologues mozambiquien et zambien sur l’utilisation du port de Nacala, situé au Mozambique, visant à dynamiser le commerce entre ces trois pays. En parallèle, un projet de rénovation d’infrastructures routières et de création de postes frontières juxtaposés sur le corridor routier de Nacala est en cours entre les trois pays.

Dernière mise à jour : octobre 2023